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Contes berbères racontés à mon fils

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Le livre de Ali Haddouchi, tiré de ses traductions des contes Amazighs de la vallée Dades vient de sortir le 1 Janvier 2013.



Dans toutes les civilisations, l’Histoire atteste que lorsqu’un peuple perd l’un de ses artistes, (intellectuels, philosophes, poètes…), on vit une disparition comme un deuil pour la culture, et plus particulièrement pour ses productions alimentaient culturellement les générations ; l’œuvre de l’auteur disparu qui fatalement constitue enrichissant la postérité. Cette fin de la vie du pinceau est ressentie plus amèrement dans les cultures de traditions orales, souvent considérées comme  cultures secondaires qui ne sont pas prêtes à s’intégrer dans l’évolution de la modernité qui a famé  face aux mécanismes qu’elle introduit, et qui étouffent le rêve immanent et l’expression naturelle des peuples.

C’est le cas en Afrique du Nord, dans la société amazighe où la tradition est quasiment présent et vivace : la parole du Sage, de l’Ancien, est admirée, écoutée,   mémorisée, voire sacralisée. La personne âgée, dans toutes les sociétés à traditions  orales, représentent de véritables livres vivants. Les jeunes et les adultes cherchent à tirer l’avantage de leur vécu, de leur bonne ou mauvaise expérience, de leurs savoirs. En effet, chez les amazighes, lorsqu’une personne âgée (Homme ou femme) vient à mourir, le décès est vécu comme un traumatisme et un deuil général .Sa mort est considéré dans le village la perte d’un trésor précieux, un patrimoine que l’on a peine à oublier. Le sage imbu d’empirisme est l’astrologue, le vétérinaire, le médecin est professionnel traditionnel de la vie. L’on comprend la tristesse de la communauté à laquelle il appartenait.

Dans le sud-est marocain, l’absence de création concrète, individuelle ou collective, d’un niveau raisonnable d’écriture demeure flagrante. Par conséquent, j’invite les âmes militantes, artistiques et intellectuelles à apporter leur pièce à cet édifice que des personnes comme Ali Haddouchi, Moha Mallal et Lhoussaine Azergui, ont commencé à bâtir, solidement. La région regorge de richesses dans tous les domaines mais cette richesse est, comme toutes les richesses, arrachées, méprisée et en voie de disparition, à cause surtout de la marginalisation politico-culturelle, appliquée de manière systématique. Et parce qu’il est aussi bon de s’autocritiquer et que la responsabilité ne peut incomber seulement à l’état, il faut admettre que la région est l’abri de nombreuses plumes en sommeil, dont le simple plaisir est de jouir de la vie d’ici-bas et d’écrire, chanter, réciter, pour des raisons folkloriques ou pour briser l’ennui au lieu d’utiliser leur art comme une arme contre l’hibernation d’un peuple qui refuse le réveil radical.

L’auteur Ali Haddouchi dans son œuvre, il a fait des efforts au niveau de l’homogénéisation structurale des nombreuses versions des contes puisque chaque conte pond diverses interprétations, ce qui fait d’ailleurs la richesse de ce genre littéraire. Traduire des expressions évoquant des détails de la vie rurale du berbère vers la langue de Molière n’est point une tâche aisée.  Et Haddouchi fait preuve, à la fois, d’audace et de modestie, dans son travail de traduction, notamment par la simplicité de son style. En réalité, l’auteur a désiré, par cette simplicité stylistique, faciliter la compréhension des lecteurs francophones, tous niveaux confondus. Au moins, les franco-berbères, résidant à l’étranger, pourront apprécier cette nouvelle approche de lecture, en goûtant dans la langue française aux saveurs des contes que leurs mères leur narraient dans leur langue maternelle, le tamazight.

Après avoir apprécié les contes de M. Haddouchi, cette plume résistante, chaque mot a éveillé en moi un sentiment de nostalgie, une introspection de moi-même, un retour dans mon enfance, une invitation au voyage, à la découverte de mon peuple et de son Histoire. C’est en cela que les contes de Haddouchi m’ont envahi par une magie à la fois étrange et attirante, qui guette les lecteurs à chaque lettre. Je découvre, grâce à l’auteur, combien les contes et légendes que nos mères et grand-mères nous contaient dans le coin sombre de la cuisine de la maison traditionnelle, autour du feu, sont précieux et plein de sagesses. Je me souviens, après avoir lu ces lignes, d’un paradoxe étonnant : la violence du froid glacial qui frappaient les enfants, troublaient les vallées oubliées de la région et faisaient vibrer les montagnes qui surveillaient le village, et dont le sommet était enveloppé d’abondante neige ; par opposition à la chaleur, à la richesse des valeurs et à la magie que véhiculent les contes berbères, superstitions qui hantent ma curiosité et suscitent en moi un élan d’admiration et de reconnaissance pour les femmes berbères, encore aujourd’hui.  Je me remémore, après avoir savouré les lignes de mon ami, ces instants privilégiés où l’on cherchait à combattre le froid et le vent frais des montagnes autour de repas bien chauds et de légendes enivrantes. Je me rappelle par le style particulier de l’auteur et les expressions qu’il s’est amusé à employer, de l’odeur de Tarwayt, ce repas traditionnel, composée de semoule d’orge ou de mais additionnée à de l’eau chauffée jusqu’à ébullition.

Cela me fait penser à ce tapis magique sur lequel je m’asseyais, et avec lequel je voyageais à travers le chant nostalgique berbère. Je vous invite, à mon tour, à vous asseoir sur ce tapis berbère et à voyager grâce à nos mères et à nos grand-mères auxquelles M. Haddouchi rend grandement hommage. Découvrir, se souvenir, se remémorer, se rappeler. Tel est le voyage que l’auteur vous invite à entreprendre par le biais de son modeste ouvrage.

Omar Zanifi (Tinmiwl, Asif n Dades)

source : AmazighNews.com

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